J’ai commencé à pratiquer le judo à l’âge de 13 ans, puis l’aïkido jusqu’en 1983, pour comprendre 15 ans après que le prof d’aïki nous faisait faire du QiGong en guise d’échauffement pour qu’on ne se casse rien en s’entraînant. Moi qui pensais faire un truc exclusivement japonais, … pour devenir samourai évidemment. L’honneur, le code, les grades, la hiérarchie, au service, … quand on a 16 ans, on y croit.
En 1989, j’ai été initié à l’énergétique chinoise, (dite « impériale », sans aiguilles), formation traditionnelle à l’ancienne, par un enseignant l’ayant lui-même héritée directement de Guyen Van Nghi, le grand (ré-)introducteur de la médecine chinoise en Europe occidentale. Et là je découvre que la Vie sous toutes ses formes est plus précieuse que tout, qu’on a le droit de réfléchir et que c’est même conseillé. C’est complété par une phrase d’un lettré chinois qui dit « l’intelligence vient du cœur« , moi qui pensais. Une révolution (intérieure et pacifique). En 1997 on m’a demandé de monter une école pour transmettre.
Après plusieurs années de pratique du yoga de l’énergie, (école de Roger Clerc héritée de Lucien Ferrer), je cherchais une pratique physique ayant une véritable application énergétique.
En 1995, j’ai trouvé du TaoYin, l’ancêtre des qigong modernes. J’ai suivi les cours de TaoYin de la lignée Ling Bao Ming, école San Yiquan de ChaLiShi (Georges Charles), pionnier des Arts Chevaleresques Chinois en Europe depuis les années 60. J’y ai découvert l’art de la philosophie en mouvement, la gestuelle avec l’Esprit et la conscience en plus.
Le geste nous apprend sur nous-même et sur la Vie. L’Art, c’est de faire les liens entre les trois. Tout est déjà en nous, il suffit d’apprendre à le lire. Tout a convergé pour m’amener là et tout fait sens.
J’ai rencontré Georges qui m’enseigne depuis 1995. ShiFu* hors pair, il est toujours accessible, disponible, gentil, respectueux de chacun et d’un incommensurable savoir à la hauteur de sa pratique.
Il est le rare (sinon l’unique) non chinois à avoir son nom sur une stèle chinoise reconnaissant son titre de « Grand Maître Héritier » (ShengRen DaoShi) d’une école purement chinoise, non seulement en Chine continentale mais aussi à HongKong et Taiwan depuis 1973.
Georges m’a permis d’enseigner le Tao San Yichuan à partir de 2003. Depuis lors, cette passion est devenue un art de vivre et de réalisation personnelle.
(Parallèlement, mon cursus de moniteur de plongée sous-marine m’a amené à être formé en pédagogie aux 1er et 2e degrés, compétences transversales que j’ai pu appliquer en entreprise et dans la transmission des Arts Chinois, ce qui m’a facilité les choses pour enseigner à des occidentaux.)
J’aime, avec cette pratique riche et multiséculaire, rencontrer des gens et leur transmettre la joie des sensations subtiles que les sages taoïstes ont su développer et conserver depuis la préhistoire dans un sain esprit devenu celui de Laozi, KongZi (Confucius), LieZi, ZhouangZi, le prince Liu Han, … : « s’élever au plus haut de soi-même et s’ouvrir plus largement aux autres », le « sens de la rectitude », sans oublier la « vertu chevaleresque ».
Aller sur place pour s’imprégner. Lors de mes voyages en Chine, j’ai pu échanger avec des maîtres chinois, authentiques, hors sentiers battus. Ça a toujours été un partage respectueux dans une grande bienveillance. Maîtres ShaoYao et YangIongRen dans le Yunnan, et LiJun dans les montagnes jaunes.
Efficace, ShaoYao était vraiment « entier comme le bois brut, prudent comme qui traverse une étendue d’eau glacée en hiver, circonspect comme qui se sent observé par ses 4 voisins« et moi j’étais « réservé comme qui se sait en visite« . (chap.15 du DaoDeJing) Alors nous nous sommes rencontrés. Une fois passé le seuil de la confiance, c’était rondeur et chaleur, authenticité et ouverture, décontraction et relâchement. Son thé était fin et délicat, servi avec l’abondance chinoise. Les échanges sont devenus profonds et simples. Le temps a cessé d’exister. Le vide parfait. 谢谢
YangIongRen, c’était un silencieux. Son âge et son économie (d’effort) n’avaient d’égal que sa sagacité et sa bonté. Chaque mot comme une flèche qui touche sa cible en plein centre avec bienveillance et humour, à la chinoise. Et du haut de ses « environs » 75 ans, il avait une peau de bébé et un teint de pêche, mais quand il te pousse il pousse ! Même avec ses charentaises roses ! L’expérience du Qi. 谢谢
LiJun, c’était un jeune maître sur la fin de sa trentaine, une grande pratique et avec la possibilité plus « sportive » dans les échanges. C’était plus … fatigant !!! Et très enrichissant sur le plan technique pure. Sa jovialité et sa générosité, son ouverture à l’autre ont créé ces instants de joie indicible de vraie rencontre. 谢谢
Ce que j’ai appris de tout ça ? … On peut tout faire sérieusement mais en s’amusant.
On peut attacher de l’importance à ce qu’on veut si on considère bien que ça ne signifie rien.
Il ne sert à rien de chercher constance et stabilité, car la seule chose qui ne change pas, c’est le changement.
Et en toute circonstance, conserver l’humour et le sourire.
Au plaisir de vous rencontrer …
Jean-Michel Boscher
谢谢 : ça veut dire « Merci » en chinois. Ça se prononce « shiéshié ».
ShiFu* : originellement ça veut dire « grand oncle », ou encore « aîné que je respecte, mais ce n’est pas mon père et donc j’écoute plus ouvertement », et par extension pour les occidentaux c’est devenu curieusement « Maître ». Et forcément un maître a des … disciples. Quelle horreur ! Pour les chinois, il y a un vieux dicton « on se réalise dans la vie de deux manières, la première c’est par la pratique personnelle, la deuxième c’est en enseignant ». Donc sans disciple pas de maître ! sans élève pas de prof ! sans personne intéressée pas de transmetteur intéressant! Tout est dit. Nous sommes tous interdépendants. Tout se vit plus dans le partage humain et le cœur.
Vous voyez tout ce qu’on peut dire à partir d’une traduction erronée, mais c’est génial, ça fait qu’on en discute.